Un matin de décembre 2019, au premier Salon de l’automobile, à Abidjan. Habib F. vient d’achever une présentation d’un véhicule à une cliente. L’homme, endimanché, a le sourire au coin des lèvres. Il sent que l’affaire est bouclée. La cliente, une dame de la cinquantaine, a pratiquement succombé au charme d’une berline de marque Renault proposée à 6,8 millions de FCFA.
Neuf ou d'occasion? Les Ivoiriens ont compris
Les commerciaux de SOCIDA, concessionnaire de la marque Renault, comme Habib, ainsi que ceux des autres concessionnaires automobiles ont beaucoup plus de sollicitations face à une clientèle de plus en plus croissante en Côte d’Ivoire. Dans le hall d’exposition, les visiteurs ne manquent pas.
«Les Ivoiriens ont compris qu’il y a plus de gain à acheter un véhicule neuf qui épargne des pannes et des frais de réparation pendant une bonne période», explique Hermann Koffi, autre agent dans le stand de SOCIDA.
Le simple fait d’avoir réussi un rendez-vous consacré aux professionnels de l’industrie automobile témoigne de la révolution dans le comportement des acquéreurs de véhicules ivoiriens.
En dehors de la haute classe, des citoyens de la classe moyenne frappent aux portes des concessionnaires.
Des engins adaptés aux portefeuilles des clients
Les acteurs de l’industrie automobile ont aussi revu à la baisse, sinon adapté, les prix des voitures à la dynamique de la hausse des ventes des engins.
«Sans forcément baisser les prix, les constructeurs ont apporté des améliorations techniques des engins pour monter la gamme», confie un homme coiffé d’une casquette de KIA Motors.
C’est le cas des SUV, la classe de quatre roues la plus prisée. Ce type véhicule allie l’allure des voitures «Tout-terrain» avec des équipements de berlines.
Mais le véritable stimulateur dans le changement d’habitude des Abidjanais est une décision politique. Le gouvernement a décidé en décembre 2017 d’interdire l’importation des véhicules d’occasion de plus de 5 ans d’âge.
«Ça a changé beaucoup de choses», répètent les acteurs du véhicule neuf.
Le Groupement interprofessionnel de l’automobile et de l’équipement (GIPAME) estime à près de 30% la hausse des ventes de véhicules neufs par rapport à l’année dernière. Autre indicateur, les importations de véhicules d’occasion ont de leur côté chuté de près de 50%.
Un autre facteur favorable au boom des véhicules neufs est l’entrée des banques dans le jeu en se laissant aller à des facilités pour acquérir des voitures. Un terrain qui jusque-là suscitait une grande méfiance.
La BICICI, par exemple, a allongé la période de remboursement des crédits avec options d’assistance.
«Nous avons lancé une nouvelle offre qui cumule le crédit et l’assurance», souligne Mme Cayo, du service commercial de la banque.
Des voitures toujours inaccessibles
Les voitures neuves sont-elles pour autant à portée de main ? Pas si sûr si on se fie aux propos de visiteurs qui admire les nouveaux modèles toujours de loin. En grande partie les fonctionnaires.
«Ce qu’ils (concessionnaires) proposent est très beau. Mais cela reste au stade du rêve pour nous les fonctionnaires», plaisante un homme qui refuse de préciser son identité.
Au stand de Toyota, les prix des voitures vont de 15 à 105 millions de FCFA.
Pour. Habib F, les fonctionnaires ne sont pas exclus. Ils sont plutôt victimes d’une approche figée du marché.
«Les fonctionnaires refusent de recourir au crédit pour acquérir une voiture neuve. Pourtant, il leur est impossible de réunir du cash. C’est dommage», explique notre interlocuteur.
Au delà des expositions, Abidjan devrait accueillir des unités de montage automobiles. L’un des projets les plus prometteurs en la matière est porté le constructeur japonais Toyota. L’Indien Ashok Leyland a aussi posé la première pierre d’une usine de production d’engins de sa marque. Abidjan, perle des lagunes, pourrait devenir alors un paradis de l’automobile.
Célestin KOUADIO
c.kouadio@acturoutes.info