Faut-il encore préférer un moteur Diesel ?
Le Figaro
Posté le: 02 avril 2011
De plus en plus coûteux et moins fiable que par le passé, le moteur Diesel pourrait bientôt voir sa position hégémonique sur le marché français remise en question.
Largement plébiscitées par les automobilistes, les motorisations Diesel ont représenté ces dernières années plus de 70 % des ventes de voitures neuves sur le marché français. Et plus de la moitié du parc automobile national en circulation. Un succès qui s'explique bien sûr par la remarquable économie du moteur Diesel, accentuée par une fiscalité avantageuse. Mais il faut garder à l'esprit qu'une partie de cet avantage est due au fait que le gazole contient 10 % d'énergie en plus que l'essence. Mathématiquement, cela signifie qu'il émet aussi 10 % de CO2 en plus par litre consommé.
Le faible coût de revient kilométrique du diesel ne suffit pas toujours à compenser le surcoût à l'achat sur le kilométrage effectivement réalisé par les acheteurs de voitures neuves. Ceux-ci le choisissent néanmoins pour sa cote à la revente d'une part, et, d'autre part, pour les bonus indexés sur les émissions de CO2. Mais certains paramètres rendent déjà ce type de motorisation moins avantageux pour une part croissante des automobilistes.
La norme Euro 5, récemment entrée en vigueur, impose par exemple à tout moteur Diesel d'être équipé d'un filtre à particules (FAP). Cela entraîne un surcoût notable à l'achat et une légère surconsommation que l'on peut admettre lorsqu'il s'agit d'améliorer la qualité de l'air que nous respirons. Mais, le FAP peut hélas être la source de graves problème techniques. Sur de courts trajets, comme ceux effectués en usage urbain, il peut s'encrasser jusqu'à remettre en cause la fiabilité du moteur qu'il équipe. Concrètement, pour que tout fonctionne correctement, il faut que le filtre soit périodiquement régénéré. Cette opération est déclenchée par une augmentation artificielle de la température des gaz d'échappement grâce à une injection supplémentaire et tardive de carburant dans les chambres de combustion. Si le parcours emprunté par l'automobile Diesel est suffisamment long et rapide, pas de problème. S'il est trop court, l'opération n'est pas menée à son terme et l'injection tardive risque de diluer du gazole dans l'huile du circuit de lubrification.
Le niveau d'huile peut alors augmenter dangereusement, au risque de provoquer une «auto-combustion» du mélange huile-gazole générant des emballements intempestifs du moteur et, parfois, une casse pure et simple. Avant d'en arriver là , le moteur peut être endommagé par défaut de lubrification ou le FAP se boucher complètement. En résumé, vouloir utiliser un diesel équipé d'un filtre à particules sur de trop courtes distances risque de nuire à sa fiabilité et engendrer des réparations dont le coût peut varier de quelques centaines à plusieurs milliers d'euros.
Et l'avenir à plus long terme du moteur Diesel n'est pas plus rose. La norme Euro 6 qui entrera en vigueur en 2014 renchérira encore son prix de revient en imposant une réduction drastique des émissions d'oxyde d'azote.
Quant à acheter ou simplement conserver une voiture Diesel ancienne sans filtre à particules, cette option pourrait aussi se révéler problématique mais pour d'autres raisons. Parce qu'ils sont jugés polluants et donc responsables du dépassement des normes européennes de qualité de l'air, ces modèles sont dans le collimateur du législateur. Au point que leur interdiction est à l'étude dans le centre des agglomérations de plus 100.000 habitants. Six Zapa (Zones d'actions prioritaires pour l'air) à Paris, Lyon, Grenoble, Clermont-Ferrand, Aix-en-Provence et Saint-Denis ont même déjà été désignées pour une expérimentation envisagée à l'horizon 2012.
Alors est ce la fin du moteur Diesel ? Pas pour les gros rouleurs utilisant majoritairement leur voiture sur route et autoroute, usage pour lequel ce type de mécanique reste sans concurrence en terme de prix de revient kilométrique. Mais pour les urbains, périurbains et les professionnels tels que taxis ou livreurs n'exerçant leur activité que sur de courtes distances, les futurs petits moteurs à essence suralimentés à injection directe ou les hybrides électrique-essence devraient, dans la plupart des cas, s'avérer plus intéressants.
Par Yves Maroselli