Ford pointe une nouvelle menace coréenne
L'argus
Posté le: 30 juin 2011
Le PDG de Ford Europe a dénoncé le pacte commercial européen qui facilite l'entrée de voitures coréennes sur le Vieux Continent et un magazine automobile met en lumière la façon dont Hyundai et Kia préparent leurs nouvelles conquêtes.
L’événement est presque passé inaperçu. Il risque pourtant d’avoir des retombées importantes, catastrophiques, même, prédisent des patrons français.
Cet accord signé le 6 octobre 2010, approuvé par le Parlement européen, le 17février, et qui entre en vigueur le 1er juillet, supprime 98 % des droits d’importation entre l’UE et le pays asiatique. C’est le premier du genre en Asie et le résultat d’une longue négociation démarrée en mai 2007.
Le Parlement européen avait approuvé l’accord dans la mesure où il inclut une clause de sauvegarde qui garantit la protection de l'industrie européenne, et avec l'assurance de Séoul que la nouvelle loi coréenne sur les émissions de CO2 des véhicules ne nuirait pas aux constructeurs automobiles de l'UE.
L'accord prévoit la suppression des droits de 8 % sur les voitures européennes exportées en Corée mais aussi la possibilité, pour les constructeurs européens, de vendre les voitures produites conformément aux spécifications de l'UE sans les soumettre à des essais supplémentaires.
En Asie, nombre d’entrepreneurs qualifient l’accord de “gagnant-gagnant”.
Pour autant, en Europe, des voix commencent à s’élever contre cette suppression des barrières douanières.
C’est le cas de Stephen Odell, le PDG de Ford Europe.
S’exprimant sur le sujet lors d'une conférence à Londres, le 28 juin, le dirigeant estime que l’accord va « beaucoup nuire » à l’industrie automobile européenne.
« L'accord donne accès amélioré aux marchés pour les fabricants coréens en Europe, alors que les possibilités d'exportation pour les fabricants installés en Europe sont susceptibles de rester strictement limité en Corée du Sud ».
Selon Automotive News, qui rapporte le propos, Ford est l'un des constructeurs automobiles, avec Fiat et PSA Peugeot-Citroën, qui craignent que l'accord conduise à une inondation des voitures coréennes low cost, déjà très agressives, sur le Vieux Continent.
Selon l'ACEA, l'Association européenne d'automobiles, l’industrie automobile coréenne exporte en Europe 2 des 3 millions véhicules vendus à l'étranger, chaque année.
A l’inverse, 95 % du marché sud-coréen est capté par les marques du pays. « La Corée du Sud a le plus faible taux de pénétration des importations des pays développés », indique l'ACEA.
Risque d'accords en chaîne...
Si l’accord est déjà en soi une menace, la crainte majeure est qu’il soit suivi d’autres. CCTV, la chaîne francophone de la Télévision Centrale de Chine commentait l’annonce de l’accord en ces termes : « Beaucoup s'attendent à ce qu'il serve de modèle à d'autres accords similaires en Asie. »
Odell le perçoit bien ainsi. Il a indiqué que l'ouverture de discussions de libre-échange entre l’UE et le Japon ne devrait pas se poursuivre tant que la question des barrières tarifaires n’auront pas été pleinement prises en compte par les Japonais.
Juste comme le patron de Ford Europe s’inquiète de la menace coréenne, le magazine Automotive News publie une enquête intitulée : « Comment Hyundai -et n'oubliez pas Kia- projettent de conquérir l'Europe et le reste du monde ». Le document, en anglais, est téléchargeable.
Par Joseph Gicquel