Face à la modestie des moyens à la disposition des organes en charge du suivi de la fluidité du trafic et la métamorphose du phénomène des tracasseries routières, la contribution des transporteurs est désormais déterminante.
L’Observatoire de la fluidité des transports (OFT) par la voix de son Secrétaire général, Dr Kouyaté Mohamed, plaide pour une « culture de la plainte » dans la corporation des transporteurs, les premières victimes et –évidemment- les premiers témoins de cette gangrène sur les corridors routiers.
« Nos résultats pourraient être meilleurs, et le fléau endigué pour peu que les transporteurs prennent la responsabilité de porter plainte », a expliqué Dr Kouyaté Mohamed jeudi au cours d’une conférence de presse. Il a illustré ses propos par l’autorégulation qui s’est développée dans le corps médical depuis que des pratiquants se sont rendu compte du risque de perdre le droit d’exercer suite à des plaintes de patients. Ce schéma serait possible dans le milieu des transports si les acteurs s’adressaient aux instances judiciaires chaque fois qu’il y a cas de racket sur les routes.
L’observatoire, en collaboration avec West Africa Trade Hub, vient d’éditer à juste titre le guide du conducteur routier et le guide du voyageur. Deux supports qui sont diffusés gratuitement en vue de tenir les usagers au fait de leurs droits et voies de recours en cas d’abus des agents chargés des contrôles.
En d'autres termes, le SG de l’OFT demande aux transporteurs et aux voyageurs de sonner le haro face aux tracasseries routières. Une interpellation qui s’aligne derrière celle du ministre du commerce, Jean-Louis Billon, qui exhortait récemment les transporteurs à « prendre leurs responsabilités » en refusant de payer tout centime indu sur les routes.
Le racket sur les routes source d’une perte annuelle de plus de 300 milliards FCFA pour l’Etat ivoirien, soit près du dixième du budget national, a suffisamment prouvé sa force de nuisance sur l’économie et de prévarication des peuples.
Pour le Lieutenant Toualy de l’Unité de lutte contre le racket (ULCR), également présent à la table de séance de la conférence de presse, la culture de la plainte qui s’instaure progressivement dans les mentalités et la prise de conscience du fait que « tout auteur de racket est condamnable » dans les rangs des forces de l’ordre sont une avancée notable pour la libre circulation des biens et des personnes.
Le dernier bilan du Tribunal militaire fait état d’une dizaine d’éléments de l’armée ivoirienne condamnés pour divers délits allant des abus de pouvoir à l’extorsion de fond à des passagers de transport en commun sur les routes de l’intérieur du pays.
Toutefois, le phénomène de racket parce que tenu par des hommes intelligents évolue selon les nouvelles variables de la recherche de la libre circulation. Comme l’a souligné M. Douka, représentant de la Chambre de commerce et d’industrie au sein du Comité national de facilitation des transports (CNF), le racket est « une maladie qui suit l’itinéraire de richesses du pays » d’où son glissement sur les routes secondaires quand les axes routiers principaux sont minés par des patrouilles des forces de sécurité.
Là encore, le remède doit être appliqué aux hommes. D’une part à ceux qui activent le racket, à qui il faut porter le message de retour à la raison, et d’autre part à ceux qui en subissent les frais sans oser se plaindre: les transporteurs.
Célestin KOUADIO