Depuis 2005, date de son élaboration, le Règlement 14 relatif au contrôle du poids et d la charge à l’essieu des véhicules, censé mettre fin à la surcharge sur les routes en zone UEMOA (Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest), connait des tâtonnements dans son application. Officiellement, «aucun État n’y va d’une application complète».
Pour décortiquer les écueils dans son application et donner un nouveau souffle à cette disposition partagée par l’ensemble des États, une réunion sectorielle des ministres en charges des infrastructures et des transports des États de la zone UEMOA auxquels se sont ajoutés ceux de la Guinée et du Ghana s’est tenue ce jeudi à Abidjan.
Le bien-fondé du Règlement 14 est pourtant su de tous: réduire les pertes liées aux accidents et surtout sauver les routes d’une dégradation progressive. Les routes sont en Afrique de l’Ouest un facteur essentiel de développement et d’extension des échanges économiques entre États.
Le réseau routier ouest-africain capte 90% du trafic de marchandises et de personnes. A cause de la vétusté du réseau ferroviaire et des tarifs parfois inaccessibles du transport aérien, les routes restent incontournables pour l’activité économique en Afrique de l’Ouest.
Une facture astronomique
C’est pourtant ce bien précieux que les États laissent disparaitre progressivement sous l’action néfaste de la surcharge des camions de marchandises. Les routes de la zone UEMOA ploient sous le poids des camions surchargés.
En 2016, plus de 51% des camions en transit en Côte d’Ivoire ont été détectés en situation de surcharge, selon Afrique pesage, la structure en charge de la gestion des stations de pesage.
30 à 60 milliards de FCFA, selon les États, sont engloutis chaque année dans des travaux d’entretien. Sur les sept dernières années, les frais d’entretien routier s’élèvent à 1680 milliards de FCFA pour les 8 États de l’UEMOA, soit environ le 1/5 du PIB de certains États, selon le rapport d’évaluation présenté par le Paul Koffi Koffi, commissaire de l’UEMOA chargé des infrastructures et des transports. Quant aux pertes, elles sont estimées à entre 30 et 45 milliards par an pour chaque État. Il est clair que le contrôle de la charge à l’essieu devrait contribuer à réduire cette facture.
Les ras-le-bol de l’UE
Désormais les États doivent faire face à une certaine lassitude des partenaires financiers tels que la Banque Mondiale et la Coopération japonaise (JICA) et notamment l’Union Européenne (UE) dont le partenariat avec l’UEMOA comporte un volet essentiel consacré aux routes.
Plus de 5000 milliards ont été décaissés par l’institution européenne pour les routes de l’Afrique de l’Ouest depuis la période des indépendances, selon Thierry Barbé, représentant l’Union Européenne (UE).
«L’UE est lassée de voir qu’un patrimoine routier conçu pour 15 ou 20 ans ne dure que 5 ans. Il y a une tolérance inexpliquée des États face à la pratique de la surcharge», a-t-il déploré.
Conséquence l’Europe a réduit de façon significative l’aide accordée à l’UEMOA pour la réalisation et l’entretien des infrastructures routières. De 1,2 milliards d’euros concédés au 2e Fonds européen pour le développement (FED), l’enveloppe s’est rétrécie à 400 millions d’euros au 11e FED.
Harmoniser les positions
Pour le président de la Commission de l’UEMOA, ce recule de l’Union Européenne doit faire comprendre aux Africains qu’ils ne doivent «compter que sur leurs propres ressources» dans sa marche vers le développement. Il a prévient que le glissement du débat sur le terrain politique ne contribue en rien à la résolution du problème.
«Nous souhaiterions que les problèmes soient réglés au niveau où ils sont abordés. Il n’est pas impossible de les régler à ce niveau. Les questions techniques ne doivent être politiques » , a averti Abdallah Bouriema.
Le ministre ivoirien des transports, présidant la réunion, a réaffirmé «qu’au-delà des aspects économiques, le réunion d’Abidjan prend en compte les mesures d’harmonisation» pour l’application de cette disposition.
«Les réflexions doivent aboutir à un consensus pour l’éradication de la surcharge sur nos routes. Le règlement 14 reste pour les Etats un engagement constant», a clamé Amadou Koné.
Quant M. Koffi Koffi, il demandé des mesures institutionnelles à chaque niveau de la chaine impliquée dans la question, à savoir: les ports, les plateformes industrielles, les postes de contrôles routiers…
Célestin KOUADIO
c.kouadio@acturoutes.info